Appréciation de la validité du critère d’attribution « circuits courts ».

La Chambre régionale des comptes Auvergne-Rhônes-Alpes a eu à apprécier la légalité d’un tel critère d’attribution mis en place par une Commune [1]

Il est manifeste que les acheteurs publics mobilisent de plus en plus les critères de développement durable dans leurs marchés[2].

L’article L.2111-1 du code de la commande publique impose en ce sens aux acheteurs publics de prendre « en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale ». Sur la base de cette disposition – qui n’est qu’une obligation de moyen – il est possible pour ceux-ci de prévoir des critères de développement durable au stade la passation des contrats de la commande publique

Toutefois, il y a une limite quant à la possibilité d’ériger de tels critères qui tient à ce qu’ils  soient liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution : Conseil d’Etat, 05 mai 2018, n°417580, Nantes Métropoles, publié au recueil Lebon.

Nb : dans le cadre d’un précédent article, nous avions relevé deux décisions du tribunaux administration qui avaient eu à apprécier la légalité du recours à un critère RSE (responsabilité sociale de l’entreprise) pour la sélection de l’offre économiquement la plus avantageuse sur la base de cette décision – TA Dijon, 7 juill. 2022, n° 2100550 et TA Bastia, 20 juill. 2022, n° 2200797 [3].

En l’espèce, la Commune avait instauré des critères d’attribution «circuits courts » tenant à la localisation du prestataire.

La CRC rappelle cette nécessité du lien avec le marché, pour que le critère soit légal, et qu’il doit s’inscrire dans le cadre d’une analyse globale de l’impact environnemental ; la simple proximité géographique de l’attributaire ne peut dès lors satisfaire à ces conditions.

La CRC a pris l’exemple d’un marché de réception et de traitement des déchets de la ville à l’occasion duquel seule la localisation de la plateforme de tri a été prise en compte au titre de l’impact environnemental. Elle estime que la commune a fait un usage inapproprié de ce critère en ne tenant pas compte du site de recyclage ou d’élimination et donc de l’ensemble des transports nécessaires.

La CRC de considérer qu’il s’agit d’une discrimination dans l’accès des opérateurs économiques à la commande publique qui aboutit à favoriser certains prestataires locaux.

Il convient donc aux acheteurs publique d’être vigilants dans la définition des critères de développement durable, au titre du lien avec le marché et à celui de l’examen des prestations qui doivent être appréciées, d’évidence, dans le cadre d’une analyse globale de l’impact environnemental ; avec une attention particulière à l’examen, selon ce prisme, du candidat lui-même[4].

Alexandre BLANCO

Avocat


[1] : CRC Auvergne-Rhônes-Alpes, 19 décembre 2022, Rapport d’observations définitives de la Commune de Villefranche-sur-Saône.

[2] : Dans le cas d’espèce, en 2021, 28% des marchés contenaient des clauses sociales ou environnementales ; en 2022, cela atteindrait  59% des marchés.

[3] : https://www.osten-avocats.com/2023/01/13/les-criteres-rse-dans-la-commande-publique-actualite-recente-des-tribunaux-administratifs-de-dijon-et-bastia/

[4] : Ibidem

Benjamin INGELAERE

Benjamin INGELAERE

Associé, Département droit public